Il y a les sportifs qui se régalent sur les sentiers de randonnée été comme hiver, à pied, à ski ou avec leurs VTT, qui dévalent les rivières en canyoning, s’élancent à travers champs au galop, sautent en parapente, et puis les amoureux de la nature qui ne se lassent pas de respirer l’air fluide en écoutant le chant des oiseaux.
Les uns comme les autres ont raison. Quel bonheur de pouvoir arpenter ces magnifiques paysages, d’ouvrir son cœur à un territoire inchangé depuis des générations.
Et il y a les nostalgiques, ceux qui, un jour de pluie peut-être, ont fait une pause, ont allumé un feu dans le poêle du salon et se sont surpris à rêver.
Alors qu’ils faisaient silence, leur esprit occupé à suivre les contorsions des flammes, envahis par une douce torpeur, peut-être des images se sont-elles invitées dans leur imaginaire.
Des questions se sont posées.
Ils ont eu envie de savoir ce qu’était cette région avant.
Alors, si les paysages sont restés quasiment intacts, il n’en n’est pas de même des villages.
Un village comme Foncine le Bas, comptait 612 habitants en 1850, contre 177 en 1990. Cela impliquait des commerces, des services, des hôtels restaurants (2), des usines, des agriculteurs, des fruitières. Il y avait 27 usines installées sur le parcours de la Saine, de sa source jusqu’à la Langouette ; scieries, moulins, fabriques de meubles…
Il y avait une école, l’église qui faisait le plein tous les dimanches, maintenant le lien entre les habitants. Immuablement, à la fin de la messe les femmes s’éclipsaient discrètement pour rejoindre leurs fourneaux alors que les hommes se retrouvaient au café.
Le confort n’existait pas, pas d’eau courante dans les maisons, pas de pompes à chaleur pour les réchauffer.
Le travail, comme le climat était rude, il fallait du courage et de la ténacité pour mener les tâches à bien.
Les mains tordues comme les ceps de la vigne de trop travailler le bois, le fer, de traire les vaches, étaient la fierté des hommes. La preuve de leur acharnement au travail. « C’est avec des mains comme ça qu’on fait des hommes, des vrais » disaient certains. Ces mains étaient aussi le signe de la parole donnée, une main serrée était le gage d’un contrat tacite et respecté, on n’y revenait pas.
De porter les charges tellement lourdes, très vite les dos se courbaient pour ne plus jamais se redresser.
Tendez l’oreille et avec un peu d’imagination vous l’entendrez le bruissement de ce peuple de montagnards courageux, de ce pays aux mille facettes.
Même si, petit à petit, le bruit de la modernité a recouvert ces murmures, certains restent inchangés, un arbre qui tombe, une vache dans son pré, le hululement du hibou, le bruissement du vent dans les arbres, ils font partie du paysage et réjouissent toujours ceux qui les écoutent.
La nostalgie s’empare de moi, des noms traversent mon esprit Jean-Claude Cordier, le père Doudier, les Fumey, la Cécile, le Patoz, la Marthe, l’Alphonse Petetin, sans oublier Auguste Cordier, propriétaire de la Grange à l’Olive.
Des noms devenus des ombres. Ombres du passé dont le souvenir me serre le cœur.
Ces ombres ne sont plus que des noms sur des tombes souvent abandonnées.
Mais la vie plus forte que tout est là et petit à petit arrivent d’ailleurs de nouveaux habitants avec leurs différences, leurs talents, et déjà de l’amour pour ce pays attachant. Le paysage humain change, s’enrichit. Alors, certes le village a bien changé, il s’est adapté à la modernité, mais gageons que ceux qui s’y sont installés sauront lui apporter un renouveau bienfaiteur.
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